Pour "écrire notre monde différemment", pour échapper aux diktats de la croissance, du développement et des projections des Institutions internationales telles que le FMI ou la Banque Mondiale, le dernier numéro du bulletin de Chimurenga, Chimurenga chronic convoque la science-fiction et l’illustration.
Comme d’habitude très prolixe, Chimurenga qui avait édité en 2008, Doctor Santan Echo Chamber, revient sur le potentiel de la SF, pour rendre compte du présent du continent africain et se projeter dans des futurs alternatifs.
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Image extraite du film Pumzi de Wanuri Kahiu, 2009
(Article initialement paru le 18 septembre 2012 dans Gaite Live, le magazine de la Gaité lyrique).
Bristol, juin 2012, pour la première fois un centre d’art conçoit une exposition centrée sur les liens entre Afrique et science-fiction et tente de comprendre de quoi ces nouvelles affinités sont le nom.
En 2009, Neill Blomkamp, réalisateur d’origine sud-africaine, petit prodige de la culture digitale et « protégé » de Peter Jackson (le père de la trilogie Le Seigneur des Anneaux), choisit de revenir sur la terre de son enfance, plus précisément à Chiawelo, un des quartiers pauvres du district de Soweto (Johannesburg), pour tourner son premier long métrage. Mêlant habilement les esthétiques du reportage de guerre, du documentaire télé et de la science-fiction, il réalise le film qui, par son succès planétaire, va marquer l’entrée « officielle » de l’Afrique dans l’univers de la science-fiction : District 9.
Il faut sûrement attribuer à District 9 l’attention dont l’Afrique fait aujourd’hui l’objet auprès des cercles d’amateurs de science-fiction. Mais comme tous les phénomènes médiatiques, il a aussi eu comme effet d’occulter la diversité des formes qu’a pu prendre l’émergence de l’Afrique dans cet univers. En témoigne l’exposition « Super power: Africa in Science Fiction » concoctée par le très expérimental centre d’art Arnolfini à Bristol.
Pour les deux commissaires, Al Cameron et Nav Haq, il s’agissait « d’analyser la tendance récente chez certains artistes, basés en Europe ou en Afrique, à prendre le continent comme élément narratif et/ou esthétique d’une fiction spéculative ». L’exposition était enrichie d’une programmation de films, rencontres, débats, conférences qui ouvraient sur les formes multiples et les interprétations complexes d’un mouvement qui en réalité est bien antérieur au film de Neill Blomkamp.
Vue depuis la science-fiction, l’Afrique aurait-elle pour rôle de catalyser les zones d’incertitudes et de turbulences qui naissent entre techno-science, mythologie et imaginaire?
L’anthropologue Louis-Vincent Thomas a mis en évidence que la science-fiction, dans ses fonctions critiques et descriptives, « pourrait bien être la sociologie imaginaire de notre présent ». En effet, à l’heure où les technologies les plus sophistiquées s’élaborent dans les laboratoires des départements de la Défense, la SF semble moins dévolue à imaginer le futur qu’à documenter le réel d’une époque marquée par des mutations d’une amplitude sans précédent. Issue d’une civilisation occidentale qui voit ses idéaux d’omnipotence s’effondrer, la SF aurait-elle besoin de l’Afrique, figure de l’altérité absolue, pour stigmatiser les zones d’incertitudes et de turbulences qui naissent entre techno-science, mythologie et imaginaire?
En 2050, l’Afrique comptera près de 2 milliards d'habitants. La pauvreté et la violence potentielle qui l’accompagne n’aura pas disparu. Concentrée dans les villes et leurs périphéries devenues gigantesques et impossibles à cartographier, elle nourrit les craintes des départements de la Défense américains qui voient dans l’urbanisation du « Tiers monde » « le champ de bataille du futur ». Ainsi dans Tetra Vaal (2004), un des deux courts métrages de Neil Blomkamp présentés dans l’exposition, le robot policier qui se déploie dans le Township emprunte largement au dispositif MOUT (Military Operations on Urbanized Terrain) conçu par le Pentagone pour contrôler les guérillas et la criminalité urbaines et dont certains développements ont été testés à Sadr City, Tijuana et à São Paolo.
Et si District 9 fait référence explicite à l’histoire de l’apartheid avec l’épisode de District 6 et ses spectres, le film met aussi en jeu la puissance médiatique de la fabrique de l’information et sa tendance à construire une image de l’Afrique, irrémédiablement enfermée dans ses tragédies : apartheid, misère, criminalité, xénophobie meurtrière, brutalité policière, expérimentations militaires et biométriques.
« L'actuelle crise mondiale montre que l’Ouest arrive à un point de saturation... Aujourd’hui, l’Afrique est encore endormie, mais elle ne tardera plus à se réveiller et le monde s'en verra transformé au-delà de tout ce que l’on peut imaginer. »
Le projet post-moderne de la science-fiction pourrait aussi être celui de produire de nouvelles visibilités.
Avec ses taux de croissance positifs, ses ressources premières stratégiques, et une population majoritairement jeune, l’Afrique dispose d’atouts porteurs d’une dynamique interne qui font d’elle le continent du futur. Pour Jonathan Dotse, blogger cyberpunk ghanéen,«l’Afrique est la frontière finale. Tous les autres continents ont joué un rôle majeur dans le profilage du monde moderne, à l’exception de l’Afrique dont le potentiel économique, culturel et intellectuel reste majoritairement inexploité. » Contrairement à une idée reçue, le continent n’est pas resté à l’écart de la révolution technologique, scientifique et médiatique. A l’instar de Spoek Mathambo, Neill Blomkamp, Nnedi Okorafor, Lauren Beukes, (les noms qui émergent quand on parle de science-fiction en Afrique), Jonathan Dotse a grandi avec la télévision et les outils technologiques. Dans un article intitulé « Developing Worlds: Beyond the Frontiers of Science Fiction », témoignage sensible et Manifeste pour une science-fiction des marges, il décrit ses premiers émois devant la découverte du genre : « Imaginez un petit africain écarquillant les yeux sur les images granuleuses d’un vieux poste de télévision réglé sur un canal VHF, un enfant qui découvre pour la première fois les images et les sons d'un monde merveilleusement étrange, au-delà des limites de la ville. C'est un de mes plus anciens souvenirs; j’ai grandi au milieu des années 1990, dans un petit immeuble tranquille de Maamobi, une enclave de la banlieue de Nima, un des bidonvilles notoires d’Accra. Mis à part la Société de diffusion gérée par l’Etat, il n’y avait à l'époque que deux autres chaînes dans tout le pays et ma famille n’avait absolument pas les moyens de s’abonner à la télévision par satellite. Néanmoins, à l'occasion, toutes sortes de programmes intéressants venus du monde entier passaient par ces chaînes publiques. C’est ainsi que j'ai rencontré la science-fiction, non pas à travers les ouvrages de grands auteurs, mais à partir d'approximations distillées de leurs grandes visions. »
Et de conclure : « Que se passe-t-il quand la jeunesse du tiers-monde a accès à des technologies qui étaient pratiquement inimaginables il y a quelques années ? Qu'advient-il si cette tendance se poursuit, disons, encore cinquante ans ? Qui est censé répondre à ces questions ? Les écrivains de science-fiction, bien sûr! »
De ces « recoins oubliés de la planète » émerge un nouveau genre dans lequel le local compose avec les codes de l’ultra modernité globalisée, la magie avec la haute technologie.
Si District 9 ou Pumzi s’inscrivent résolument dans la tradition du film d’anticipation, les productions africaines de science-fiction tentent aussi de marquer leur spécificité, notamment en se réappropriant la culture du rapport au surnaturel et au savoir magique. « Zoo City » de l’écrivaine Lauren Beukes, en est l'exemple le plus médiatisé. Edité en juin 2010, ll a obtenu l’année suivante le prestigieux prix Britannique Arthur C. Clarke du meilleur roman de Science fiction.
L’auteure se sert de la spécificité de Johannesburg, vue de Hillbrow, le quartier réputé le plus dangereux de la mégalopole, pour construire une fantasy urbaine chaotique, schizophrène et hallucinée. Sans complexes se côtoient les usages des technologies numériques et du savoir mystique dans une société qui réinvente son rapport à la nature en attribuant aux criminels (plus nombreux qu’on ne le pense) un animal symbiotique conférant à son maitre un pouvoir magique.
Autre exemple : Les Saignantes, du réalisateur camerounais Jean-Pierre Bekolo (2005). Dans le film le mevungu (association secrète de femmes qui pratiquent un rite purificateur des vols et adultères) est régulièrement évoqué par une discrète voix off féminine.
Comme l’esquissent les deux commissaires de l’exposition, ne serait-ce pas l’Afrique qui serait la grande gagnante de ces emprunts à la science-fiction? Enfin libre de dessiner les contours de sa propre modernité, elle aurait trouvé dans la science-fiction, ce nouvel «espace autre» défini par Michel Foucault, une hétérotopie dont la fonction serait d’être un formidable réservoir d’imaginaire pour élaborer son futur.
Oulimata Gueye
Dakar le 26 mai 2014. Selly Raby Kane, fashion designer, envahit l'ancienne gare ferroviaire de Dakar avec ses créatures mi alien mi cartoon. Le photographe ivoirien Paul Sika, le collectif de Ouakam Les Petites Pierres, sont mis à contribution pour faire le show et remettre au centre l'énergie urbaine dakaroise !
Edgar Arceneaux: I did have a third category of how I see you using materials, which is synthetics, be it hair, mylar, sheets of vinyls that look like wood. These are things that have the qualities of being natural but are actually made with machines. Blurring the lines between organic and synthetic imbues your backgrounds with additional associations to concepts of science fiction. When we talked about particles, bleeds, and strains of interactions in your art materials, these are also the same fear-inducing qualities of the antagonist in much of science fiction, fantasy and horror genres films today. Dispersions of airborne viruses producing zombies or wiping out of society with an incurable disease, or on the genetic level, dealing with bio-technology, genetic manipulation, mutation, genetically altered foods and the cloning of human beings. All cause radical restructuring and conflict within both the human body, as well as the societal body. In most Hollywood films, disfigurement is treated as something to be suppressed, pushed back into the shadows, but in your work, you use it as a means to dispel illusions. In spite of that, your work is very seductive to so many people, could you talk about why you think that is?
Wangechi Mutu: I don't even know what people are actually seeing, I can only see through my eyes, or how it feels to be making it, or what if feels like to see these characters created in their environments. I do know that I have a deep fascination in what is considered to be "not-normal," what is considered to be the quintessential look where an ethnicity is considered to be normal. Who came up with and why? What is the purpose of coming up with those delineations and categories? In many ways I see it as a thread running through my work. I see it in pinups, in female insects to cyborgs, everything has this question of beauty, appearance, perception, our claim to understand a person's history and their intentions is based on appearance. That is why I play with this notion of what draws you in, what gives you a sense of comfort, gives you a set of codes that allows you to judge this person. "Oh, I know this person, they're morally in the right place," and I can therefore allow them in. As a non-American, as someone bureaucratically and officially alien, that term itself raises questions about what that means anyway. If you see any depictions of alien in Hollywood or mass media and apply it to yourself, there is inevitably going to be this disconnect or questioning. That's where some of those things come from.
New Kenyan Sci-Fi Series Imagines Immigration In Reverse, As Africa Becomes World’s Oasis
At a time when Africa receives 50,000 Greencard Lottery wins each year to migrate to the US alone, this new production series seeks to address ongoing immigration issues within the world. It is also expected to change the negative portrayal of Africa as a poverty stricken continent to that of an avenue for development, of which, would gradually discourage youth from seeking “greener pastures” abroad. As the brain child of Dr. Marc Rigaudis, directed by Cherie Lindiwe from USIU, the new plot revolves around a young couple embarking on a treacherous journey to reach mankind’s last cradle of hope, Africa. However, the couple must beat the impossible odds, experience great sacrifice yet keep their faith before their goal can be achieved.
H/T Shadow and Act
Dessin: diving belle / drawing and glass beads / 42cm x 22cm / 2011
Pamela Phatsimo Sunstrum vit et travaille en Afrique du Sud. Artiste et chercheuse au Centre for Creative Art of Africa de l’Université de Wits à Johannesburg, elle cherche à travers le dessin, la vidéo, la performance et l'installation, à faire dialoguer science, mythologie et visions du futur. Elle défend l’idée d’une émergence de la science-fiction dans l’art, la littérature et la culture populaire en Afrique —distincte de l’Afrofuturism— qui fonctionnerait comme un outil créatif et politique permettant aux africains d’analyser le présent, d’imaginer de nouveaux futurs possibles et de réinterpréter la mythologie à travers la catégorie de la science-fiction.
Dessin: strato 1 / drawing / 30 x 30 cm / 2011
Le travail de Pamela Phatsimo Sunstrum est présenté en France dans le cadre de l’exposition "Spectaculaire" conçue par les ateliers internationaux du Frac des Pays de la Loire en collaboration avec la commissaire sud-africaine, Nontobeko Ntombela.
Avec "Un-Fathom", qui cite le "Voyage au centre de la terre" de Jules Verne, Pamela Phatsimo Sunstrum rend hommage au maître de la science-fiction et fait référence à la tradition du voyage de découverte et d'exploration qui marque son époque. Elle réitère également l'observation selon laquelle " la mythologie et la science tentent de construire et déconstruire les même mystères —à savoir : la nature, l'histoire, le sens et l'avenir des choses."
Dessin: Un-Fatom / brou de noix et crayon sur papier / 140 x 300 cm / 2013
"Géomance" qui complète son exposition suggère l'intrication de la géologie et de la divination. C'est également le nom de la performance qu'elle a conçu avec l'artiste Thenjiwe Nkosi et sur laquelle je reviendrai.
Geomance / matériaux divers / 2013
Dessin: Un-Fatom / brou de noix et crayon sur papier / 140 x 300 cm / 2013
Jusqu’au 19 janvier 2014, l’exposition présente les travaux des artistes sud-africains Donna Kukuma, Pamela Phatsimo Sunstrum, Thenjiwe Nkosi et Madeyoulook. C’est un événement associé à la Saison Afrique du Sud - France.