Il y a quelques années je me suis fait battre, quelques coups de poing par un inconnu, au milieu d’une rue pas si déserte que ça. Je n’ai jamais su qu’il était ni pourquoi il a fait ça. Je me rappelle des coups, je me rappelle des gens qui marchaient rapidement autour de moi regardant ailleurs, je me rappelle du mal. Ca n’a duré que quelques minutes tout au plus, jusqu’à ce qu’un petit couple de petit vieux vienne à ma rescouse. L’homme a arrêté mon agresseur et lui a tenu une leçon de vie, pendant que la femme est venue me voir. Je me souviens pas si elle m’a parlé, pris dans ses bras ou si elle est juste restée à côté de moi. Mon agresseur est parti et le couple m’a ramené chez moi. Ce soir-là j’ai pleuré dans les bras de mes parents, puis j’ai oublié. J’ai vécu comme si rien ne s’était passé pendant deux-trois ans.
Puis un jour les souvenirs de “La jeune fille de 14 ans″ sont revenus. Un peu comme une baffe, ou un nouveau coup de poing. Je n’arrive pas à me rappeler quand. Peut-être que c’était cette fois là où un de mes amis m’a mis un coup de poing dans le bras pour rigoler, ou quand j’ai vu cet homme mettre une claque à son fils, ou alors,... Je sais plus. C’est juste revenu et depuis ça me hante. Juste ce qu’il faut, pour me faire vivre dans la peur.
Je garde pour moi, j’accepte que mon nouvel ami me pousse un peu fortement, malgré la peur que j’ai, j’accepte ses tapes amicals. Je ferme les yeux quand je sens quelqu’un marcher derrière moi dans la rue, je ferme les yeux et j’espère que ça ne va pas recommencer. Je grince les dents quand je vois des gens me regarder en ville. Je continue de marcher. Puis quand ça arrive chez moi, quand ma mère lève la main, quand ma soeur me parle brusquement, quand mon père claque la porte un peu fort, quand un plat est posé brusquement sur la table, alors à ce moment je vais m’enfermer dans la pièce la plus proche. Je laisse couler les larmes que je retiens depuis le début de la journée.
Quand je me sens capable de ressortir et d’affronter le monde, alors je me relève et essuie les larmes qui ont coulées sur mes joues. Et même si je sais que ma famille me veut aucun mal, que mes amis ne me frapperont jamais, que je suis tombée sur un inconnu stupide, que tout le monde n’est pas comme lui. Je vis dans la peur jour après jour. Une peur que personne ne comprend vu que personne n’a vécu ça. Une peur dont je ne parle pas et fais semblant qu’elle n’existe pas.
La peur ne vient pas toujours après l’accident, la peur prend son temps pour s’établir